EDITO AVRIL 2024 : par Julie Varta

Illustration actualité

(Re)découvre toi du fil

Il y a quelques jours, en week-end dans la maison familiale pour aller me baigner dans le chocolat, allongée sur le lit de mon adolescence, je regardais le beau temps par la fenêtre. Il m’a fait un signe de la main. Dans mes oreilles, Blackbird.

À la fenêtre, cet oiseau apparaît. Étrange coïncidence. Il vole à plusieurs reprises, de haut en bas du cadre. Je crois qu’il est blessé. Mais non. Il teste, il essaye, il se jette à corps perdu au risque de tomber à nouveau. Et dans un dernier saut, il s’envole et disparaît, hors du cadre. 

C’est en ce jour poisson que j’ai senti des ailes me pousser. 

Dans mes oreilles, c’est au tour de April come she will. Simon & Garfunkel y chantent – en 1 minute et 49 secondes très précisément – une poésie de l’évanescence.

Les choses viennent et s’en vont au rythme des saisons. 

À la fenêtre, les branches d’un arbre et ses bourgeons. Nous sommes avril. Et je comprends que c’est cela avril. Le mouvement. C’est à la fois l’au revoir et le bienvenu. Le lâcher prise. C’est s’arrêter, regarder derrière soi, voir ce qui fut et ce qui n’est plus. Accepter l’impermanence. S’ouvrir à ce qui sera. 

C’est le retour de l’odeur du soir. Celle qui te fait revivre certains souvenirs. Celle qui est prête à en accueillir d’autres. C’est l’envie de se dévêtir petit à petit, de tirer le fil, de sentir les courants, dans son cou, sur ses bras, encore un peu frais mais ravivant chaque partie endormie. C’est écouter la ville se réveiller, les rues s’animer de nouveau, les terrasses s’agiter. Voir les fleurs éclore. Les couleurs réapparaître. Que ça vive dans tous les sens, que ça bouge, que ça frissonne. C’est le retour des rayons sur le visage. Le cœur qui se répare des fissures de l’hiver.

La renaissance. 
L’instant présent.
Oui c’est cet instant précis. Celui-là. Que tu prends pour lire ce poème, sourire à cet inconnu, écouter cette chanson, boire ce sirop. Pour regarder les visages qui t’entourent, ceux qui t’embarquent contre vents et marées. Oui celui-là. Cet instant précis qui se trouve au creux de ta main et qui n’attend que toi pour être cueilli. Celui où tout est possible. Où nait l’envie de se laisser traverser là, percuter juste ici, au milieu de ton plexus solaire, que tout se réanime, que l’air se régénère, que les poumons eux aussi fleurissent à nouveau de l’intérieur. Qu’elle sorte cette mélodie. Qu’elle crie. Qu’elle crie à quel point c’est bon d’aimer et de se le dire. De le chanter. 

Alors peu importe les quelques jours de pluie qui persistent comme pour nous dire qu’ils ont été et seront de nouveau. 
Peu importe mai, juin, juillet, août, septembre et tous les autres. 
Aujourd’hui c’est avril.
L’heure de se jeter à corps perdu.
Ou à corps retrouvé. 
L’heure où l’on peut se laisser pousser des ailes.
Et ça, c’est le plus important non ?

Julie Varta

crédit photo : Benjamin Ranger

« Dans l’air immobile
D’un été parfait
Tu avancerais
Te sentant comblée
Par toutes les saisons
Qui t’ont précédées
Et les autres qui
Te succèderaient »

Comme au jour premier, Dominique A

Catégorie : Humeurs
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